HOTEL DE LA TRÉMOUILLE A PARIS QUINZIÈME SIÈCLE Encore une tige, une fleur épanouie de notre art moissonnée, abattue sous nos yeux. Encore un noble et beau débris de moins parmi nous ; perte à jamais irréparable pour celte ville de toutes les grandes créations , comme de toutes les folles et incessantes destructions : car, dans son sein toujours déchiré et toujours renouvelé, Paris, de son glorieux passé du moyen âge, de son originalité jadis si féconde en monuments domestiques de tous genres, n’a presque rien conservé de vivant et debout. Après les ruines du temps, les mutilations barbares; après les dégradations lentes, les subites démolitions. Et s’il fut, il y a cinquante ans, dans la destinée de coupables instruments d’anéantir tant d’œuvres des ancêtres, tant de vieux types d’architecture, objets de nos regrets, aurait-on pu croire que celte mission de leurs sauvages mains se serait transmise de nos jours, non moins redoutable peut-être jusqu’aux organes les plus élevés du pouvoir. Cepen dant nous avons été témoins de ces déplorables transmissions : l’édifice qui va nous occuper nous les rappelle tristement. Malgré l'intérêt qui s’attache au mal heur même de déchéances méritées, ce retour vers de fatales traditions nous obsède sans cesse et nous irrite encore. Qui ne se souvient comme nous avoir vu le premier en dignité des préfets de la France stipendier les démolisseurs de 1830. Puis, dix ans plus tard, dans le calme à peine reconquis de l’ordre social, qui na pu voir l’un des pénultièmes successeurs à celte haute charge s’en prendre aux pierres que nous cherchons à relever ici de notre plume, en les abandonnant à dessein aux vents des plus vulgaires intérêts. Faut-il donc que nous aussi nous en appelions des morts, pour apprendre aux vivants en faveur à mieux mourir? Faut-il , dans nos justes rigueurs, accuser aujourd’hui des tombes honorées, pour en tirer d utiles enseignements au profit de l’avenir? Quelque peine qui s’attache à ce devoir, nous le remplirons avec